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Californication (Saison 2)

Lorsque Hank Moody, au volant de sa Porsche décapotable crasseuse, enlève son ex-femme le jour où celle-ci décide de se remarier, il ne roule pas vers son avenir. Non. Moody effectue un demi-tour, et tenant les rênes de sa monture borgne, il fonce vers l’idée de ce qu’aurait pu être son passé. Si la saison 1 de Californication a été celle de la révélation, la saison 2 qui vient de s’ouvrir sur Showtime est celle de la compensation, celle où il est temps pour le héros de faire amende honorable.

Signalons que certains éléments de l’histoire sont dévoilés ci-dessus. Spoiler ?

Déplorer ce changement de cap -ce virage à 180 degrés- est compréhensible. Les 12 premiers épisodes reposaient en grande partie sur la personnalité de Moody, sorte de fils caché de Charles Bukowski et de Dean Martin, rejeton élevé dans la contre-culture californienne et nourri au biberon qui a récemment coûté la vie à James Crumley. Cette trajectoire originelle ne pouvait pas être suivie plus longtemps. Moody, qui vivait une espèce de rêve (faire ce qu’il veut, dire ce qu’il pense, coucher avec qui il a envie), doit revenir au principe de réalité.




Tenter d’étirer le personnage comme un élastique pour l’amener au bout d’une deuxième saison revenait à organiser le suicide de la série. Son créateur, Tom Kapinos, a compris que l’idée de départ était arrivée au bout de sa logique, et il a suivi ce que la raison lui dictait : transformer Hank, faire tomber son masque et le montrer tel qu’il est (peut-être) au fond de lui-même. Un père de famille, pas tout à fait conventionnel, pas tout à fait rangé des voitures, mais un père de famille quand même, et assez conservateur avec ça.

Cette transformation est annoncée dès les cinq premières minutes. Elle épargne les faux espoirs. Patch, capote et vasectomie. Hank se consacre à la monogamie, il se préoccupe de sa santé, assume ses responsabilités ou du moins essaie de les assumer. Cette métamorphose (on a presque l’impression de voir un serpent qui s’extrait de sa mue) est si radicale qu’on peine à la juger crédible. Toutes les contingences domestiques sont réglées en même temps comme si pour les besoins du scénario il convenait de se débarrasser des corvées narratives afin de passer à autre chose.

Sans doute, Hank étant surtout un acteur de sa propre existence, on pouvait lui prêter de ne pas être une victime incurable de ses addictions. Celles-ci faisaient partie de son style de vie, du jeu qu’il jouait, et rien de plus. Il était donc aisé de les balayer sous le tapis lorsque le besoin d’un ménage de la quarantaine se fit sentir. C’était d’ailleurs une des faiblesses de la saison 1 : le manque de profondeur de Hank. L’absence de démons (à part celui de ne plus réussir à écrire, et encore) et l’impression que son existence n’était qu’une vaste farce qu’il orchestrait pour son seul plaisir égoïste et puéril. Bon, admettons qu’un simple coup de baguette change le vilain crapaud en prince charmant.

Le thème qui inaugure la saison 2 est donc celui de la rédemption (et là, cela fait un peu conservateur). Le message est relativement clair. Vous pouvez être le dernier des connards (a prick), il vous reste un espoir de retrouver le chemin menant à la lumière. Vous n’êtes pas perdu. Cela est évident dès les premières scènes, quoi que les choses sont plus compliquées et moins grossières que ça.

D’abord, parce que malgré toute sa bonne volonté, Moody ne peut quand même pas totalement échapper à son tempérament. Ce qui lui vaut de se retrouver en taule pour outrage à agent de police. Ensuite, parce que se crée un phénomène de vases communicants entre l’écrivain et son agent, Charles Runkle. Alors que Moody se repent, Runkle plonge tête la première dans le chaos personnel. Les rôles s’inversent. L’ancien tuteur devient la plante qui menace de crever sur pied, si on ne la soutient pas.

En fait, on glisse tranquillement de la vie désordonnée de Moody à la vie désordonnée d’Hollywood. On élargit le cadre, sans abandonner le thème d’origine.

Dans ce tableau agrandi, Moody occupe une place de choix, mais plus une place centrale. Ceux qui lui donnent la réplique prennent une importance croissante, notamment sa fille Rebecca et son agent Runkle. La relation père-fille est abordée, mais sous l’angle fille-père, l’adolescente se chargeant de jouer les adultes et de rappeler à ses parents leurs devoirs et les bonnes règles de conduite. Tout en continuant (évidemment) à enfreindre ces dernières. Ce n’est pas forcément marrant d’avoir un père et une mère qui ont parfois le même âge mental que vous. Cela fait un peu cliché.

Le transfert de personnalité opéré entre Moody et Runkle est le point fort de ce début de saison. Non que le talent de David Duchovny soit en cause, mais celui d’Evan Handler illumine le deuxième épisode. Son personnage résume à lui seul toutes les dérives dans lesquelles baigne une petite partie de la population d’Hollywood. Il y a en creux une critique (pas très neuve et un peu facile) de cette société privilégiée, hypnotisée par la gloire, l’argent et l’illusion que faire ce que l’on veut est l’expression ultime de la liberté.

L’autre amélioration apportée à Californication est un humour plus corrosif qui ne repose plus uniquement sur le tempérament désabusé du héros. Certains dialogues sont hilarants. L’assistante du chirugien qui effectue la vasectomie s’adresse à Hank pour lui parler de son attribut masculin : “great looking cock“. Rebecca rend visite à son père qui est en garde à vue au dépôt de la police de L.A. et lui fait cette recommandation. “Don’t bend over for the soap“.

La série trouve rapidement un nouvel équilibre et une sorte de maturité, même si des faiblesses demeurent dans le scénario. Un célèbre producteur de musique, Lou Ashby, apparaît comme par magie, paie la caution de Hank et lui propose d’écrire sa biographie, mettant ainsi fin à ses ennuis. Une ancienne maîtresse de Hank propose à Karen un boulot de décoratrice. Et tout d’un coup, la famille Moody retombe sur ses pieds. Trop facile.

Mais cela est vite et facilement pardonné car l’ensemble est traversé par un nouveau souffle. Et puis aussi parce que les références musicales évitent les fautes de goût. Le thème de California Dreamin’ interprété par les Mamas & Papas sert d’introduction à l’épisode 1. Un rappel concernant la vie débridée de Jimmy Page est fait par Ashby qui possède une réplique de la célèbre guitare à deux manches du musicien de Led Zeppelin dans sa chambre.

Fiche technique

Tournée à Los Angeles par Aggressive Mediocrity Inc. Producteurs exécutifs: Tom Kapinos, David Duchovny. Producteur: Lou Fusaro. Réalisateur: Duchovny. Auteur: Kapinos. Genre: comédie dramatique. Saison 2. Durée épisode: 30 minutes. Début saison 1: 28 octobre 2007.

Casting: Hank Moody (David Duchovny), Karen (Natascha McElhone), Marcy Runkle (Pamela Adlon), Becca (Madeleine Martin), Mia (Madeline Zima), Charlie Runkle (Evan Handler)





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